Paris - Oeuvre sur papier
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Les écritures rebelles
"Barbelés infranchissables pour qui s’acharne à la conquête du sens, les jeux d’écriture de Renaud Allirand déconcertent et fascinent ceux que ne décourage pas la vérité voilée du poème ou de l’énigme. L’artiste ne détruit pas les mots de la langue. Il les contourne et les enfouit. S’agit-il de les préserver en les rendant illisibles ? Comme un voleur qui se dissimule dans la foule, il cache son trésor dans la forêt des signes.
Cette écriture protège une joie secrète. Elle efface ses traces pour sauver sa liberté. Ses ruses écartent les pilleurs. Ecriture à rebours qui exulte de se perdre pour mieux se retrouver; filet jeté en haute mer qui retient sa capture. Le temps n’est plus où l’on se devait de renouer les mailles des discours galvaudés. Il faut tout réinventer en eau profonde. Ni appât, ni simulacre, le leurre proclame sa raison d’être : quand les mots défaillent, ces griffures dans la nuit creusent une aube nouvelle. Ainsi les premiers hommes, voleurs du feu, traçaient sur la roche obscure les animaux fantômes de leurs rêves pour marquer leur passage.
Ecriture rebelle à trop de clarté qui protège dans ses replis les découvertes de l’enfance éblouie. Avec obstination, l’artiste tisse la toile qui tamise une lumière trop vive. Gravures qui s’offrent au regard pour le retenir et le libérer; alternance d’une curiosité vaine et d’un renoncement apaisé. Du secret pressenti, Renaud Allirand nous fait accepter le mystère où ce qui dérobe est plus précieux que l’apparence. Comment décrire cette irradiation des mots engloutis? Il faut s’attarder et se laisser envahir par le frémissement de ces arabesques incompréhensibles qui semblent emprunter aux temples de l’Orient leur hommage à un Dieu qui ne saurait être représenté. En se dissimulant, l’artiste livre ce qu’il a de plus précieux.
Voici le roncier sauvage où chante l’oiseau invisible. Dans son ombre lumineuse veille l’espérance plus forte que la mort." Jacques Robinet
The rebel writings
Impenetrable for those who insist upon finding meaning, Renaud Allirand’s graphic writings both disconcert and fascinate viewers who aren’t discouraged by the veiled truth of poems or riddles. The artist doesn’t destroy words. He works around them and buries them. Is he trying to preserve them by making them illegible? Like a thief who gets away by disappearing into a crowd, he hides his treasure in the forest of signs. This writing protects a secret joy. It rubs out its traces in order to save its freedom. Its tricks keep plunderers away. This backwards writing exults in losing itself to better rediscover itself, like a net thrown into the high seas that retains its catch. There’s no longer the obligation to tighten the loose ends of clichéd discourse. Out in deep water, everything must be reinvented. Neither bate nor charade, the illusion declares its reason for being: when words fall short, these enigmatic marks bring forth a new beginning. As such, the first humans, pillagers of fire, drew the ghostlike animals of their dreams upon dark rocks, leaving a trace of their presence. The rebel writings, being too precise, protect within their recesses the discoveries of a bedazzled childhood. Obstinately, the artist spins a graphic thread that subdues an overly intense light. Etchings retain and liberate the gaze, alternating between vain curiosity and peaceful renunciation. Out of an intuitive secret, Renaud Allirand leads us to accept the mystery: that which is concealed from sight is more precious than appearance. How to describe this profusion of engulfed words? We have to take our time, indulge our gaze in these quivering, indecipherable arabesques that seem to have been taken from temples of the Orient and drawn in homage to an unrepresentable God. By keeping himself under cover, the artist offers what’s most precious to him. Here is the wild bramble bush from which an invisible bird sings. In its luminous shadow there lingers the one hope that is stronger than death.